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Francesco Mirabelli
•Avec Black Phone 2, Derrickson étend l'univers du premier film, mais il le fait en prenant des risques et en s'écartant considérablement du prototype. L'histoire se déroule en 1982, quelques années après les événements originaux : Finney (Mason Thames) ne peut s'empêcher de penser à sa mésaventure dans la cave du psychopathe connu sous le nom de Rapace et tente de reconstruire sa vie avec sa sœur Gwen (à nouveau interprétée par Madeleine McGraw), qui continue toutefois à avoir des visions nocturnes troublantes. Leur calme apparent est brisé lorsque Gwen découvre que ses nouvelles visions sont liées à leur mère, décédée par suicide lorsqu'ils étaient enfants, et à un camp de vacances dans le Midwest où leur mère avait travaillé comme instructrice. Gwen, Finn et leur ami Ernesto décident alors de partir pour Alpine Lake, près d'un lac gelé, où la saison des vacances est cependant retardée à cause d'une violente tempête de neige. Dans cet endroit peuplé des fantômes du passé, semble être gardée la vérité sur le Rapace.
Black Phone 2 démarre lentement, hésitant. Derrickson met presque une heure avant que l'histoire ne prenne vie, consacrant trop de temps à des séquences oniriques répétitives et à des moments insistant sur les rêves de Gwen. Ces rêves, cependant, ne sont pas de simples remplissages, ils sont visuellement très évocateurs et renvoient directement aux super8 maudits de Sinister, autre culte du réalisateur. Derrickson a une rare capacité à inspirer la terreur par les images : son horreur est faite de suggestions visuelles, de jeux de lumière, de cadrages étudiés qui perturbent plus que n'importe quel "jump scare". Cependant, dans Black Phone 2, ce talent est dilué dans une durée excessive (presque deux heures) qui aurait bénéficié d'un montage plus sec.
Mais lorsque le film accélère, dans la deuxième moitié, Black Phone 2 devient un concentré d'horreur pure. Ici, Derrickson s'amuse à mélanger des inspirations provenant des grands classiques du genre, notamment la saga A Nightmare On Elm Street et Vendredi 13. Du premier, il hérite de l'idée d'une entité agissant à travers les rêves : le Rapace est une variante de Freddy Krueger, une ombre qui observe, persécute et tue en se déplaçant entre sommeil et éveil. De Vendredi 13, il reprend le cadre du camp de vacances, les instructeurs suspicieux et le lac - ici glacé et spectral - qui devient le théâtre de la finale. Même les mouvements du Rapace rappellent Jason Voorhees, avec une démarche lourde, menaçante et une hache toujours prête à frapper.
Le nouveau look du Rapace est effrayant et évocateur : il n'est plus un simple tueur en série masqué, mais une créature surnaturelle avec des traits presque animaux, un croisement entre démon (le masque a toujours été clair) et spectre. Le choix de le rendre moins humain et plus symbolique fonctionne et restitue à son image cette dimension iconique qui en fait un parfait croque-mitaine.
Côté casting, Derrickson confirme son attention envers les jeunes acteurs. Madeleine McGraw, qui était la co-protagoniste dans le premier film, devient ici le véritable pivot émotionnel de l'histoire. Elle porte le film avec naturel et donne de la crédibilité aux moments les plus visionnaires, réussissant à équilibrer fragilité et détermination. À ses côtés revient également Mason Thames, que l'on a vu récemment dans Dragon Trainer, qui donne à son personnage plus de confiance et de courage. On retrouve également Jeremy Davis dans le rôle du père et, bien sûr, Ethan Hawke derrière le masque du démoniaque Rapace.
Le dernier acte, situé sur le lac gelé, est anthologique : tension parfaitement calibrée, impact visuel extraordinaire et une montée en puissance qui culmine dans une séquence mêlant suspense, splatter amusant et un goût visionnaire. C'est là que Black Phone 2 atteint sa meilleure forme, rappelant pourquoi Derrickson est l'un des rares réalisateurs grand public capables de construire l'horreur selon les logiques du cinéma indépendant.
Dommage que le film arrive à ce point après une première heure alourdie par des redondances narratives. Si la partie introductive avait été allégée et le développement rendu plus serré, Black Phone 2 aurait pu devenir un petit classique de l'horreur contemporaine. Tel qu'il est, il reste une suite efficace, visuellement riche et cohérente dans l'esprit, mais un peu déséquilibrée entre ambition et mesure, néanmoins inférieure au premier volet.