RG
Roberto Giacomelli
•Lance Preston est le visage de ESP - Phénomènes paranormaux, une émission de télévision à succès qui vise à faire du spectateur le protagoniste d'expériences paranormales. Pour ce faire, Lance et ses collaborateurs se rendent dans des lieux notoirement hantés par des présences paranormales et documentent tout à travers leurs caméras. Pour le quatrième épisode de ESP, Lance et son équipe se rendent à l'ancien hôpital psychiatrique de Collingwood, abandonné depuis des années et théâtre dans le passé d'atroces morts. Les journalistes intrépides se font enfermer à clé dans l'hôpital pour une nuit entière, seul le gardien ira retirer les cadenas le matin suivant. Lorsque en 1999 "The Blair Witch Project" a fait ses débuts dans les cinémas du monde entier avec une campagne publicitaire à faire pâlir n'importe quel film actuel de Michael Bay, beaucoup ont été déçus, criant au scandale, à la supercherie médiatique de ceux qui avaient voulu faire passer du fumier sec pour un délicieux chocolat fourré à la crème de café. "The Blair Witch Project" peut plaire ou non, mais à l'époque, ce fut sans aucun doute un film qui prenait au dépourvu, laissait désorientés, mais avec le recul, même ses détracteurs les plus acharnés doivent admettre la portée innovante et l'importance qu'il a représentée pour le genre horreur. En effet, à distance de 12 ans, on continue à reproduire, imiter, citer l'œuvre de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez qui, sans l'inventer, a porté à la notoriété le langage du mockumentary. Aujourd'hui, les Vicious Brothers (Stuart et Colin Vicious de leur vrai nom) reprennent un film à la Blair Witch, avec les similitudes appropriées avec "[Rec]" (ou "Quarantaine", vu la nationalité de l'œuvre) et la mise à jour des temps avec une utilisation massive d'effets visuels. Le résultat est "ESP - Phénomènes paranormaux" ("Grave Encounters" en version originale), un mockumentary qui part du prétexte du "found footage" (c'est-à-dire du film retrouvé) pour mettre en scène un film d'horreur sans trop de fioritures, qui va droit au but et se présente comme un spectacle d'horreur rempli de frayeurs, de monstres et d'effets spéciaux. Vu sous cet angle, "ESP - Phénomènes paranormaux" peut sans aucun doute être un représentant agréable de son genre, dans la mesure où il vise à éliminer les temps morts et le minimalisme de célèbres représentants, comme le déjà cité "The Blair Witch Project" et "Paranormal Activity", en misant sur le spectacle pur. Pourtant, en faisant cela, toutes les prétentions hypothétiques de réalisme que des produits de ce genre peuvent avoir vont à vau-l'eau, tant que dans un film comme "ESP" demander au spectateur de croire que ce qui est montré à l'écran soit le compte-rendu de faits réellement arrivés est chose vraiment ardue, sinon impossible. Mais aux Vicious Brothers cela ne semble visiblement pas importer et peut-être se laissent-ils trop emporter, tombant dans un excès de "vulgarité" dans une paire de scènes. C'est précisément pour cette propension à l'excès et à la peur facile que "ESP" divertit, apparaît comme un jeu auquel on demande au spectateur de participer. Donc des fantômes qui déforment soudainement les traits de leur visage, des mots gravés à sang sur le corps des protagonistes, des bras qui surgissent de nulle part et du sang, précisément ce à quoi on s'attendrait d'un film américain de fantômes mais pas d'un mockumentary. Au-delà de certaines scènes particulièrement bien réussies qui ont pour protagonistes des fantômes furieux et des bassins remplis de sang, ce qui frappe dans "ESP" c'est la volonté et la réussite de faire de la location le protagoniste de l'histoire, c'est-à-dire l'hôpital de Collingwood. L'hôpital est vivant, il n'y a pas à tourner autour du pot, il change de forme, désoriente et induit à la folie en se transformant en une véritable prison surréaliste avec des couloirs infinis, des murs qui surgissent de nulle part et des sorties qui se transforment en entrées. Une partie du succès de ce film réside précisément dans la location appropriée et sa valorisation. Il y a des choses dans "ESP" qui ne satisfont pourtant pas autant, à commencer par un style de télévision vérité qui parfois semble même incorrect. À certains moments, comme au début où le film retrouvé est introduit avec une interview, la caméra tremblante et les zooms utilisés sans critère ne sont absolument pas justifiés et la même chose se produit plus tard, toujours pendant des interviews avant que les protagonistes ne se fassent enfermer dans l'hôpital. C'est-à-dire, dans des cas comme ceux-là, où l'on interviewe quelqu'un qui est immobile devant l'objectif, en général on utilise un trépied et certainement on ne va pas manipuler le zoom pour ne pas rendre difficile le travail du monteur. Mais cela, les Vicious semblent ne pas le savoir et ils placent des simulations de caméra à la main et des mouvements bruts même là où ce n'est pas nécessaire. La fin du film laisse également un peu à désirer...et par fin, j'entends précisément la fermeture, avec un climax continuellement annoncé et toujours reporté qui, au moment où il arrive réellement, semble alors trop bref et peu emphatique. "ESP" est du cinéma jetable, il ne sera certainement pas retenu dans le futur, mais dans l'hic et nunc il divertit, sait divertir et se propose comme un regard différent sur le genre du mockumentary, plus axé sur le genre pur, sans temps morts et chutes de rythme. Et dans un genre aujourd'hui saturé comme celui-ci, c'est déjà un bon mérite. Retirez une demi-courge à la note finale.