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Roberto Giacomelli
•2022. Depuis quelques années, l'Amérique est devenu l'un des endroits les plus sûrs au monde, et tout cela grâce à l'initiative entreprise par les Nouveaux Fondateurs d'Amérique, un organisme gouvernemental qui a sanctionné et imposé la ratification du 28e amendement pour codifier le droit de chaque citoyen américain à la liberté de commettre tout type de crime, y compris le meurtre, pendant une nuit par an, sans subir de conséquences pénales, précisément la nuit entre le 21 et le 22 mars, entre 7 heures du soir et 7 heures du matin. On l'appelle "l'Émeute annuelle" et James Sandin, qui vend des alarmes et des systèmes de sécurité, a fondé sa fortune sur le besoin des personnes de se protéger cette nuit de l'année contre la violence qui éclate dans les rues.
À quelques heures de l'Émeute annuelle, James, sa femme et ses deux enfants se barricadent chez eux en attendant le matin, mais un homme de couleur commence à demander insistant de l'aide dans la rue. Le fils cadet des Sandin décide de faire entrer l'homme dans la maison, mais un groupe de voyous masqués et armés jusqu'aux dents assiègent la maison des Sandin avec l'intention de se faire remettre leur proie.
Jason Blum voit loin, producteur à la tête de BlumHouse et artisan de succès à petit budget tels que "Paranormal Activity", "Insidious" et "Sinister". La formule de sa factory est maintenant rodée : des budgets qui ne dépassent pas 5 millions de dollars par film, des histoires pas nécessairement originales mais fondées sur des concepts bien précis, un genre de référence dans le thriller/horreur, des lieux principalement en intérieur et une grande importance accordée à la construction de la tension. Une formule éprouvée à laquelle ne se soustrait pas "La nuit du jugement", coproduit également par la Platinum Dunes de Michael Bay, Andrew Form et Brad Fuller, un film effrayant et intelligent qui a juste récolté un grand succès auprès du public et de la critique d'outre-Atlantique.
Le point de départ du scénario de "La nuit du jugement" a été donné au réalisateur et scénariste James De Monaco par un épisode qui lui est arrivé il y a quelques années. Alors qu'il était en voiture avec sa femme, De Monaco a failli mourir à cause d'un automobiliste imprudent qui les a fait sortir de la route ; le réalisateur, furieux, s'est jeté sur le pirate de la route avec l'intention de le tuer à coups de poing, mais sa femme l'a arrêté à temps, commentant ensuite avec son mari qu'il serait idéal si au moins une fois par an les gens pouvaient libérer librement la violence refoulée. Une phrase qui a tourné dans l'esprit du réalisateur pendant plusieurs années jusqu'à donner lieu à l'histoire racontée dans ce film, où l'on respire une atmosphère d'horreur politique ancienne que l'on n'avait vraiment pas goûtée au cinéma depuis longtemps.
Sur une base de film d'invasion domestique - comme on appelle ces films où un groupe de personnes doivent se défendre eux-mêmes et leur domicile contre une menace venant de l'extérieur - qui pour certains aspects pourrait rappeler "The Strangers", James De Monaco parvient à construire un mélange parfait entre thriller/horreur et critique sociale offrant de nombreux sujets de discussion et de réflexion. Tout d'abord, "La nuit du jugement" parle de la nature humaine, de sa prédisposition à la violence et de la manière dont la violence fait partie intégrante de l'instinct humain. Sur cet axiome simple, même banal, De Monaco décide de lancer plus d'une flèche aux politiques gouvernementales qui réussissent en se fondant sur des présupposés monstrueux. C'est la force du paradoxe qui fait de l'Amérique une nation gagnante, semble nous dire ce film, un pays fondé sur le sang qui cherche satisfaction dans le sang, promouvant avant tout l'industrie des armes, deus ex machina qui semble protéger chaque minute de l'Émeute annuelle racontée dans ce film. Et les instigateurs de l'Émeute semblent être surtout les classes sociales les plus aisées, cette bourgeoisie enrichie qui nourrit de la haine et de l'envie envers le voisin simplement parce qu'il a eu plus de chance économique, ou élève des enfants qui prodiguent la violence envers les minorités au nom d'un idéal éthique/religieux non précis. Une bourgeoisie sans visage (se cache derrière des masques grotesques et rieurs), une masse indistincte qui semble être revenue à un état primitif/infantile qui s'en prend à un sans-abri de couleur et à quiconque lui offre l'hospitalité.
Il est impossible de ne pas penser à Carpenter ou à Romero des débuts et peut-être n'est-ce pas un hasard si De Monaco a dans son curriculum le scénario du beau remake de "District 13", qui avait dans le casting Ethan Hawke, prêt à défendre sa famille et son domicile des sanguinaires enfants de papa sans visage.
"La nuit du jugement" fonctionne, a un beau sujet porté avec intelligence et cohérence, ainsi qu'une série de scènes de tension bien placées et efficaces. On peut passer outre quelques caractérisations un peu banales de certains personnages (la fille adolescente, par exemple) et la manie du fils des Sandin avec la technologie, qui fait très (mais vraiment très) années 80. Le film est beau et raconte quelque chose, à sa manière, de nouveau.
Une mention particulière à l'actrice Lena Headey, ex Sarah Connor télévisée, reine Gorgo dans "300" et maintenant splendide Cersei Lannister dans la série "Il trono di spade", qui interprète ici la mère et épouse Mary Sandin de manière mesurée et crédible.
Chaudement recommandé.