LE DERNIER EXORCISME

Le Révérend Cotton Marcus appartient à une famille de ministres de culte depuis bien quatre générations. Éduqué à ce métier dès l'âge de quatre ans, Cotton a pratiqué 47 exorcismes sans croire le moins du monde que ses "patients" étaient vraiment possédés par des démons. Maintenant, le Révérend a l'intention de se retirer de cette activité et pour le faire, il décide de pratiquer un dernier exorcisme devant les caméras, afin de révéler ses trucs et de dénoncer les dangers qui se cachent derrière les faux cas de possession démoniaque. Pour son dernier exorcisme, Cotton se rend à Ivanwood, en Louisiane, où la jeune Nell de seize ans semble être possédée par le démon. Le mockumentary naît comme un langage expressif, un expédient original pour rendre réalistes, à travers la simulation du documentaire, des histoires qui ne le sont généralement pas. "Cannibal Holocaust" pose les bases sans avoir de véritable suite, "Le Caméraman et l'Assassin" utilise cette forme expressive comme expérimentation et "The Blair Witch Project" lance la mode en offrant le mockumentary au succès et à la commercialité. Aujourd'hui, le mockumentary, plus qu'un langage, semble être devenu un genre à part entière, voire une tendance, vu qu'il est pratiqué avec une grande fréquence au sein du genre horreur. Le mockumentary est rentable : les coûts de production sont très bas et le retour est assuré, se transformant souvent en phénomène (voir "The Blair Witch Project" et "Paranormal Activity"). Pourtant, trop d'offre tue l'offre et lorsque la demande ne répond pas toujours de manière positive. Dans le cas de "L'Ultime Exorciste", il ne s'agit pas d'une question de succès au box-office, puisque le film a bien rapporté, mais de l'avis du public qui semble s'être lassé de l'ex-nouveauté mockumentary, répondant avec indignation au dernier représentant de la tendance. Peut-être est-ce la faute de la campagne promotionnelle décidément trompeuse qui promet une version contemporaine de "L'Exorciste" alors que le film de Daniel Stamm ("A Necessary Death") a peu ou rien à voir avec le film de Friedkin. "L'Ultime Exorciste" parle essentiellement de bigoterie religieuse et de superstition et des dangereuses conséquences auxquelles tout cela peut mener, il parle de réalité et non de fantastique/paranormal tout en restant jusqu'à la fin ancré à une double interprétation des faits qui donne au film une fascinante ambiguïté de lecture. Nell est-elle vraiment possédée ? Ou est-elle victime d'une éducation fondamentaliste qui a miné sa capacité à se rapporter à la réalité ? Le scénario de Huck Botko et Andrew Gurland aborde ce thème et y joue habilement en portant l'histoire du côté de "L'Exorcisme d'Emily Rose" ou, encore plus, de celui de son épigone allemand "Requiem". Oubliez donc les têtes qui tournent de 360° et les geysers de vomi verdâtre, ici les lits qui dansent et les cris ultraterrestres ne sont que les trucs du métier du révérend escroc. Pourtant, "L'Ultime Exorciste" ne manque pas de moments à tension très élevée qui exploitent bien l'angoisse que seuls les mockumentary sont capables de transmettre. La première nuit que Cotton et son équipe passent seuls dans la maison avec la prétendue possédée a quelques trouvailles de frissons garantis et le bizarre anti-climax final réussit à laisser positivement impressionnés. Les interprètes fonctionnent plutôt bien, de Patrick Fabian ("Partnerperfect.com") dans le rôle du révérend Marcus, un personnage bien différent du stéréotype de l'homme religieux qui a perdu la foi, à Ashley Bell qui nous offre une possédée très crédible. Bravo et intense aussi Louis Herthum, qui interprète le père de Nell. C'est une caractéristique qui fait perdre des points à "L'Ultime Exorciste", une erreur impardonnable (je ne saurais pas comment l'appeler autrement !) qui lui enlève de la crédibilité en tant que mockumentary : le film présente des effets et une bande sonore, un montage tout à fait cinématographique (avec des ponts extérieurs !) et des sous-titres en surimpression, le tout absolument non justifié et non justifiable aux yeux d'une histoire qui ne peut pas contenir de telles "finitions", au risque de manquer de crédibilité du produit final. Même le style sale et maladroit des prises de vue, faites de zooms soudains, de flous et de tremblements, ne semble pas crédible, vu que les prises de vue devraient être effectuées par un caméraman professionnel et non par un amateur. Comme pour rappeler à tout prix la maladresse amateur de "The Blair Witch Project" même là où ce n'est pas nécessaire. "L'Ultime Exorciste" se révèle donc un produit valable et presque original dans le genre dans lequel il s'insère, compris à la fois comme mockumentary et film d'exorcisme. Quelques précautions supplémentaires pour le rendre plus crédible en tant que mockumentary lui auraient pourtant donné une épaisseur plus consistante, mais le film reste néanmoins agréable et à certains moments inquiétant.